Le marché de l'Art européen et ses entraves
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Après le regroupement du marché de l’art international sous la houlette de deux grands entrepreneurs français, on doute que ceux-ci ne puissent faire pression pour alléger la rage taxatoire qui s’est abattue ces dernières années sur l’Europe et plus particulièrement sur les ventes publiques françaises. Les Anglo-saxons et particulièrement les Anglais ont toujours été soucieux d’accorder un avantage fiscal sur leurs concurrents. Ils ont été les premiers à s’opposer à la taxe de 5,5 % qui est due sur l’importation des objets d’art en Europe et avaient retardé de quelques années son application en Angleterre. Le parlement britannique a aussi expressément exonéré les catalogues de ventes publiques du droit de reproduction. Mais la taxe d’importation européenne est maintenant d’application en Angleterre.

Certains vendeurs français, belges ou d’autres nationalités prennent de plus en plus la voie de la vente de gré à gré pour la simple raison suivante : une seule commission et une TVA sont applicables lors de la vente sur la marge bénéficiaire alors que l’on peut arriver, à Paris par exemple, jusqu’à cinq taxes pour une transaction en vente publique. Sont comprises dans ces cinq taxes : la taxe à l’importation en Europe de 5,5 % si d’application, la TVA à la vente soit 18,60 % sur les honoraires de l’expert et du commissaire-priseur, le droit de suite de 3 % si d’application, la taxe de plus-value de 5 % (cette dernière ne touche que les résidents français), la taxe de bourse de garantie de 0,25 % qui remplace l’ancienne taxe de la bourse commune des commissaires-priseurs.
Le consommateur français est évidemment pénalisé par rapport à l’Anglo-saxon par exemple, qui pour l’instant ne paie pas de droit de suite (du moins, encore pour l’instant).Tony Blair reprendrait sa parole après s’être montré un ardent défenseur de la non-application du droit de suite. Un rapport du sénateur français Yann Gaillard a très bien souligné dans une étude fouillée l’inutilité de ces taxes. Celui-ci explique clairement combien ces impositions ont profité jusqu’à présent aux salles de ventes anglo-saxonnes et suisses.

Dans ce concert de taxes, n’oublions pas qu’avant la septième directive européenne communautaire qui fut d’application en 1995, la France payait encore un taux de TVA de 18,6 % à l’importation en Europe, contre 5,5 % actuellement ! La Suisse, quant à elle, a introduit une TVA de 7,5 % et les Etats-Unis, pour leur part, ne prélèvent toujours rien. D’où l’afflux des oeuvres d’art à New-York et l’appauvrissement de l’Europe. Et ne parlons pas des cas suivants en France : un meuble Art Déco de moins de 100 ans d’âge ou des autographes et des manuscrits sont eux taxés encore au taux de 18,6 % et pas de 5,5 % à l’importation !

Les hommes politiques européens n’ont apparemment toujours pas compris que contrairement aux biens de consommation qui doivent être exportés au maximum et l’importation de marchandises réduite, pour les oeuvres d’art, c’est le contraire qui est bon pour la culture européenne... ! D’où, il faudrait une inversion logique de la charge à la sortie et pas de taxe à l’entrée. Ce nouvel impôt ne rapporte d’ailleurs rien aux états membres et leur fait perdre notre spécificité européenne, en l’occurrence notre culture qui ne rentre plus en Europe et qui reste aux Etats-Unis ou en Asie, par exemple.

A propos de ce dernier continent, l’Europe aurait fort intérêt à faire tomber au plus vite cette taxe à l’importation, car de gigantesques collections de tableaux impressionnistes trop cher payées dans les bonnes années reviendraient plus facilement ici, en Europe, pour être revendues. En effet, de nombreuses sociétés japonaises endettées seraient ravies de récupérer une partie de leur trop payé il y a déjà plus de dix ans avant la fin de la décennie 1980. Cette époque connut des records historiques rarement encore égalés actuellement dans les tableaux modernes et plus particulièrement impressionnistes, elle fut suivie de l’écroulement du marché en 1991.

Après ces considérations principalement d’ordre fiscal, il est intéressant de citer deux autres graves entraves au marché de l’art :

1. Le droit de suite :

Le droit de suite, en 1999, serait déjà reconnu dans onze pays de la communauté. Cette charge de 3 % est prélevée chez le vendeur uniquement en vente publique. Le Japon, les Etats-Unis, la Suisse et beaucoup d’autres pays ne l’appliquent pas. Voilà une distorsion de plus à faire disparaître. Tout le monde sait que ce prélèvement profite à des ayants droit souvent déjà nantis au lieu d’aider justement les artistes dans le besoin. Les parlementaires français voudraient réorganiser cette taxe en la mettant à charge de l’acheteur et non du vendeur, ceci en vertu du fait que le marché est fait plus par le vendeur. Nous ne suivons pas ce raisonnement, car toute taxe, qu’elle soit due par le vendeur ou l’acheteur, grève le produit final de la vente. En effet, un acheteur pénalisé par une nouvelle charge achètera ou paiera moins en vente publique et le vendeur sera à nouveau pénalisé et pensera à nouveau à vendre son éventuel chef-d’œuvre sous des cieux plus cléments.

2. Le droit de reproduction :

Ces charges sont prélevées généralement chez le vendeur dans les pays où elles sont d’application. A nouveau, cela fait fuir les vendeurs. Même si c’est le commissaire-priseur qui paie ce droit, cela diminue son bénéfice et sa capacité de promouvoir notre culture. Il faut dire que si le droit de suite est déjà appliqué, le fait d’appliquer en plus le droit de reproduction est ressenti comme une double rémunération en faveur de l’auteur ou ses ayants droit. La chambre syndicale des salles de ventes belges refuse à raison actuellement d’acquitter un forfait annuel à la Société des Auteurs-Compositeurs, ne voulant pas accentuer encore une fois les frais acheteur-vendeur en vente publique qui s’élèvent déjà à un montant de 35 %.

Dernières orientations:

L’Angleterre qui fut le fer de lance de la résistance à la taxe à l’importation et au droit de suite cède aussi sur tous les fronts face à la majorité européenne qui entretient encore un combat d’arrière garde face à la modernité américaine. Nous pensons que même la Suisse qui s’est toujours montrée très libérale suivra aussi et ne pourra continuer à faire cavalier seul face à la pression économique européenne, du moins dans un avenir situé à environ dix ans. La pression fiscale accrue de l’Europe des quinze va grandissante dans le monde de l’art. Au regard de cette situation, les Etats-Unis qui n’appliquent pas toutes ces contraintes trouvent un allié naturel dans l’Europe qui travaille pour la culture américaine… Par taxes interposées… !